Aux Cinq Rues, Lima - Mario Vargas Llosa

Lima- Gallimard 2017 - Folio 2019 -

- Traduit de l'espagnol ( Pérou ) par Albert Bensoussan et Daniel Lefort -

"Le voyeurisme est le vice le plus universel qui soit. Vous le savez mieux que personne : nous voulons connaître les secrets et, de préférence, les secrets d'alcôve. Fourrer son nez dans l'intimité des puissants, des célébrités, des importants."

Lima, années 90. Alors que le dictateur Fujimori a plongé le pays dans la peur et la violence, deux couples de la haute société se retrouvent mêlés à un gigantesque scandale politique, médiatique et sexuel. Quelques photos compromettantes, un maître chanteur, un crime crapuleux : entre érotisme et corruption, chacun cache un secret dans cette sulfureuse comédie de moeurs.

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Après avoir découvert l'auteur péruvien, Nobel de littérature, Mario Vargas Llosa avec Le rêve du Celte, je poursuis la découverte de son oeuvre.

Ce roman a des allures de roman noir. Il nous entraîne autant dans les arcanes de la presse people que dans celles du pouvoir; le pouvoir étatique et le pouvoir économique. Parce que ce dont nous parle ce roman, c'est de la société péruvienne et de classes sociales.

L'auteur n'épargne personne, à une exception prêt, un artiste de rue vieillissant, trop modeste, poursuivi par la déveine. Il nous raconte le succès de la presse à scandale, son impudeur, ses déloyautés, ses manipulations, sous couvert d'information. Il nous raconte sa puissance, par les images, par le bavardage, le goût du scandale, la banalisation de l'indécence et du voyeurisme. Toutefois, il n'y a pas réellement de victimes dans ce roman. Si une indiscrétion dévoilée est fausse, d'autres secrets non revélés, tout aussi scabreux, existent. Les puissants - " prestige, pouvoir, fortune " - se protègent ou se défendent de ce " journalisme"  - " ceux qui vivent du Qu'en dira-t-on " - par l'argent, par les relations.

A travers la violence de ce sujet, Mario Vargas Llosa nous décrit la violence de la société péruvienne, situant le récit à Lima, entre les villas et ce quartier Cinq Rues - - ce carrefour labyrinthiquenombril des Hauts Quartiers - cette zone si appauvrie du centre de Lima " - qui témoigne de l'histoire, de l'évolution de cette société :

Quand Juan était jeune, ce quartier était plein de tavernes populaires, c'était là où vivaient beaucoup de gens de la bohême, artistes, musiciens, et même les petits Blancs de Miraflores et San Isidoro, amoureux de la musique populaire, venaient écouter les meilleurs chanteurs, guitaristes et batteurs de caisse, et danser avec les métis et les Noirs. Il restait encore trace de la belle époque des Hauts Quartiers, celle de La Palizada, de Felipe Pinglo et de tous les grands compositeurs et promoteurs de cette musique. Maintenant, ce quartier s'était dégradé et ses rues étaient dangereuses. Mais Willy se trouvait là dans son élément, à la tête de son tripot. Il gagnait sa vie à l'aise, même si Juan Peineta avait peur qu'un beau jour il se fasse poignarder. "

Au-delà de Lima, c'est le Pérou en écho sur les pages, les attentats, le Sentier Lumineux, les enlèvements, les sabotages, le Mouvement Révolutionnaire Tupas Amaru ( MRTA ), le couvre-feu, les coupures de courant, une actualité angoissante, brutale. 

Aux Cinq Rues, Lima est un roman prenant, aux personnages bien campés, qui nous emmène plus loin que le Pérou, au plus près de nos sociétés occidentales.

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- Participation au Mois de l'Amérique du Sud avec Ingannmic & Goran -

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Commentaires

  • Kathel

    1 Kathel Le 05/02/2021

    Tiens, j'avais lu des avis assez mitigés sur ce roman à sa sortie, ce qui m'en avait détournée. Je peux donc le garder à l'esprit, grâce à toi, mais j'ai déjà "La ville et les chiens" dans ma pile à lire (pas pour cette cession de février, je le crains).
    marilire

    marilire Le 06/02/2021

    Ce roman n'est pas aussi " fort " que Le rêve du Celte. On est plutôt dans un roman de moeurs, un roman sociétal. Comme toi, je ne lirai pas tout ce que je pourrai lire de ma Pal en littérature d'Amérique du Sud :-p
  • keisha

    2 keisha Le 06/02/2021

    Pour ce challenge, je pensais aussi à Vargas Llosa, mais Le rêve du celte, après un gros livre sur le Congo, j'ai évité. Là, c'est violent?
    marilire

    marilire Le 06/02/2021

    C'est plus osé que violent ( quelques scènes de sexe ), la violence est sociale.
  • claudialucia Ma Librairie

    3 claudialucia Ma Librairie Le 07/02/2021

    Je viens de lire mon premier Vargas Llosa avec La fête au bouc. Le roman se passe au temps de la dictature de Trujillo à Saint Domingue. J'ai donc envie de lire un livre de lui sur le Pérou. Celui-ci n'est pas le meilleur, semble-t-il ? Tout le monde me conseille Le rêve du celte. Qu'en penses-tu ? Si je ne le lis pas pour ce mois de Février, je le ferai plus tard !
    marilire

    marilire Le 07/02/2021

    J'ai lu ta chronique sur La fête du bouc, avec intérêt. Ce sera certainement ma prochaine lecture de Vargas Llosa. Le rêve du Celte est excellent. Toutefois, l'ensemble du récit ne se déroule pas au Pérou, seulement une partie. Je te le recommande tout de même, il est passionnant. Et cette partie sur le Pérou est édifiante, sur l'exploitation de l'Amazonie et des Indiens.
  • Goran

    4 Goran Le 07/02/2021

    Je connais l'auteur, pour l'avoir lu quelquefois, mais pas avec ce texte. En tout cas ton article donne envie et puis j'aime bien cet écrivain...
    marilire

    marilire Le 07/02/2021

    Merci, il est certain que je vais relire Mario Vargas Llosa.
  • krol

    5 krol Le 07/02/2021

    De cet auteur j'ai beaucoup aimé La fête du bouc... Je note Le rêve du celte...
    marilire

    marilire Le 07/02/2021

    Et je souligne La fête du bouc :)

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