La claire fontaine - David Bosc

Claire fontaine bosc

- Verdier - 2013 -

.

L’homme qui venait de franchir la frontière, ce 23 juillet 1873, était un homme mort et la police n’en savait rien. Mort aux menaces, aux chantages, aux manigances. Un homme mort qui allait faire l’amour avant huit jours.
En exil en Suisse, Gustave Courbet s’est adonné aux plus grands plaisirs de sa vie : il a peint, il a fait la noce, il s’est baigné dans les rivières et dans les lacs. On s’émerveille de la liberté de ce corps dont le sillage dénoue les ruelles du bourg, de ce gros ventre qui ouvre lentement les eaux, les vallons, les bois.
Quand il peignait, Courbet plongeait son visage dans la nature, les yeux, les lèvres, le nez, les deux mains, au risque de s’égarer, au risque surtout d’être ébloui, soulevé, délivré de lui-même.
De quel secret rayonnent les années à La Tour-de-Peilz, sur le bord du Léman, ces quatre années que les spécialistes expédient d’ordinaire en deux phrases sévères : Courbet ne peint plus rien de bon et se tue à force de boire ?
Ce secret, éprouvé au feu de la Commune de Paris, c’est la joie contagieuse de l’homme qui se gouverne lui-même.

.

Ce récit est un délice, on le savoure et on le dévore pour peu que l'on s'intéresse à la peinture et à l'effervescence de cette fin du XIXème.

Ce récit, c'est Gustave Courbet, le peintre réaliste – ni nostalgique ni moderne [...] le réalisme de Courbet est une riposte à la fable sociale, au fameux modèle de société, à la civilisation, au programme des écoles des classes asservies, au programme des écoles des classes dirigeantes, aux recueils de lecture à l'usage des jeunes filles. le réalisme de Courbet lacère les décors derrière lesquels on accomplit la sale besogne, il déchire les toiles peintes : les bouquets d'angelots par-dessus les théâtres, les fées clochette, les diables, les allégories en fresque dans les écoles et dans les gares, où l'on voit les déesses de l'industrie et de l'agriculture, les splendeurs des colonies et les prodiges de la science. » – ; c'est Gustave Courbet le communard- bien que jamais on ne l'entendit faire l'ancien combattant. La Commune était dans son coeur comme un amour défunt. -, les quelques années, les dernières années de sa vie au bord du Léman et les emmerdements qu'a entraîné la destruction de la Colonne Vendôme; c'est la nature et sa nature, son plein appétit, son intempérance.

Ce récit est servi par une écriture fameuse, une écriture gourmande et virile, vive et charnelle qui sait vous croquer une description en deux coups de plume.

" Avec son bout de lac en cravate de pierre, avec sa campagne tout aussitôt française, Genève lui fut un repoussoir; elle était trop politicienne, loin des forêts; la fumée y stagnait sous les plafond bas. "

Une centaine de pages foisonnantes d'images et de camaïeux qui donnent vie, par touches, à l'époque, la violence de ses révolutions politiques et artistiques autant qu'aux tableaux; une centaine de pages sur lesquelles on croise des extraits de documents authentiques – correspondances et rapports de police – et les chemins de poètes, Rimbaud, Baudelaire.

- Re-publication ( 2013 ) -

Et parce que j'aime les paysages de Gustave Courbet :

.

Courbet chevreuil lyon

La remise des chevreuils en hiver - 1866 -

( au Musée des Beaux-Arts de Lyon, acquis en 1883 )

.

 

Gustave courbet bords du doubs 1866

- Bord du Doubs, effet d'automne - 1866 -

.

Courbet maree basse

- L'immensité - marée basse, soleil couchant - 1869 -

.

Gustave courbet winter in the jura

- Hiver dans le Jura - vers 1875 -

.

- Sur la couverture de La claire fontaine : La femme à la vague ( 1868 ) -

*

 

Commentaires

  • A_girl_from_earth

    1 A_girl_from_earth Le 17/01/2022

    Ton billet donne très envie de découvrir cette écriture qui semble si exquise ! Et puis c'est sur Gustave Courbet, encore plus appétissant !
    marilire

    marilire Le 18/01/2022

    J'avoue, dans le premier mouvement, c'est pour le sujet et la maison d'édition que j'ai choisi ce livre. Bonne pioche !
  • Aifelle

    2 Aifelle Le 18/01/2022

    J'avais remarqué ce texte, puis perdu de vue, merci de me le remettre en mémoire. (ainsi qu'une expo Courbet au Grand Palais ..)
    marilire

    marilire Le 18/01/2022

    Après les peintures, ce récit est prenant tant il donne corps au peintre.
  • Kathel

    3 Kathel Le 18/01/2022

    Adrien Bosc ou David ? Seraient-ils frères ? ;-)
    Ces tableaux de Courbet sont superbes, merci !
    marilire

    marilire Le 18/01/2022

    Oh la, merci pour ta remarque, je les ai emmêlés ! Comme quoi, vraiment, ça se confirme, aller vite et préparer plusieurs articles en même temps ( je suis dans la deuxième revue de presse janvier et une série BD ), ne me convient pas du tout. Conclusion : je publie trop ;-)
  • Dominique

    4 Dominique Le 18/01/2022

    je te suis totalement dans l'amour des paysages de Courbet
    ce livre est passionnant et je l'ai aimé, il vient d'en publier un sur Simon Weil
    marilire

    marilire Le 18/01/2022

    Tu confonds, comme moi ! Les auteurs ont le même nom de famille. " Colonne " sur Simone Weil, que j'ai chroniqué il y a peu, est écrit par Adrien Bosc. Celui-ci est de David Bosc. Ravie de te retrouver sur les paysages de Courbet. " L'immensité " me fait toujours rêver.
  • Autist Reading

    5 Autist Reading Le 18/01/2022

    J'ai été moi aussi induit en erreur par le patronyme de l'auteur : j'ai pensé qu'il s'agissait d'un nouvel( ?) écrit du précédent... et je m'étonnais qu'il soit édité chez Verdier.
    Du coup, l'équation Verdier + Courbet + auteur inconnu au style singulier m'est beaucoup plus séduisante. Je note la référence illico !
  • Autist Reading

    6 Autist Reading Le 18/01/2022

    PS : Ah non, je ne m'étais pas trompé : dans mon agrégateur, c'est bien Adrien Bosc qui apparait toujours dans le titre de ton billet :-D
    marilire

    marilire Le 20/01/2022

    Tu peux considérer que c'est moi qui t'ai induit en erreur. Je te conseille tout de même ces deux livres :)
  • Tania

    7 Tania Le 20/01/2022

    Belle "Immensité" qui me rappelle la toile où l'artiste salue la mer d'un grand coup de chapeau !
    marilire

    marilire Le 21/01/2022

    Je ne suis pas particulièrement sensible aux peintures marines mais celles de Courbet m'emportent.

Ajouter un commentaire