La fille du fermier - J.Harrison

Harrison

- Folio novembre 2017 -

- Traduit de l'américain par Brice Matthieussent -

Dans ce texte âpre, "Big Jim" nous emmène dans un Montana aussi beau qu'hostile et livre un portrait féminin subtil, non sans échos avec son majestueux Dalva : celui d'une jeune fille meurtrie, aussi blessée qu'en quête de vengeance...

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J'ai croisé ce petit opus Folio lors d'une balade en librairie début décembre, installé parmi les nouveautés en format poche, je l'ai emporté, cette collection étant le prétexte parfait à la découverte d'un auteur. Cette belle nouvelle d'une centaine de pages est issue d'un recueil de trois nouvelles édité par Flammarion intitulé Les jeux de la nuit ( publié maintenant par J'ai Lu ).

Première lecture, donc, de Jim Harrison, mieux vaut tard que jamais. En goûtant la puissance de cette écriture, sa densité, j'ai compris pourquoi et comment les récits de Jim Harrison envoûtaient. Et j'ai été surprise. Si je m'attendais au souffle narratif et descriptif, je ne m'attendais pas à ce mélange des genres, entre crudité-brutalité et évocations culturelles, si intimement liées. Dans cette nouvelle, la littérature et le piano sont omniprésents. 

Comme l'indique le titre, il s'agit d'un récit d'apprentissage, une enfant qui grandit dans le Montana - celui de l'élevage, de la chasse - dans les années 80, après la décision de son père de changer de vie. Elle y vit une vie sauvage, d'une - solitude aussi vaste que le paysage -, de balades à cheval ou de lectures. Sa découverte de la littérature, des auteurs américains, des questions que suscitent ses lectures, ainsi que les moments au piano qui apaisent la jeune héroïne parsèment les pages autant que les coups de fusils et les coups à boire.

Sarah, cette jeune fille, devenue lycéenne, n'est pas tant en quête de vengeance qu'en quête de sens, de réponses, de la compréhension rassurante qu'elles pourraient lui apporter.

" Elle pensa au mal qu'on pouvait faire à quelqu'un, un mal parfois incalculable, et puis il y avait aussi le mal qu'on se faisait parfois à soi-même , en s'endurcissant. "

L'émotion, comme l'humanité des personnages, affleure, simplement, évidente. C'est un singulier portrait d'adolescente que signe Jim Harrison dans cette nouvelle, avec la force de l'écriture pour en dessiner les fragilités et les douleurs, avec, en creux, en ombres, ce petit monde du Montana qui - "était peut-être immense, mais il vous enfermait." , des portraits d'autres femmes, et celui du vieux cow-boy Tim, de son amitié improbable et magnifique avec Sarah. 

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" Ce garçon prénommé Terry prêta à Sarah des romans de Theodore Dreiser, John Dos Passos et Steinbeck, un volume de Henry Miller intitulé Sexus qu'il avait acheté à Missoula, et les recueils de poèmes de Walt Whitman, à mille lieues des textes de Tennyson et de Kipling que sa mère l'obligeait à lire. Dans l'air froid de la cabane à outils, Sarah lut avec terreur le livre de Henry Miller. Pourquoi une femme acceptait-elle de faire toutes ces choses ? Début mars, son père surprit les habitudes de lectures de Sarah et il installa un chauffage électrique dans la cabane à outils. Sarah venait de découvrir Willa Cather et c'était quand même plus agréable de lire ces livres sans se geler les fesses. "

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Commentaires

  • chinouk

    1 chinouk Le 13/12/2017

    Tu n'avais jamais lu de Jim Harrison ? ben ça alors ! voila qui est réparé, et du coup bonne découverte pour la suite :)
  • Marilyne

    2 Marilyne Le 13/12/2017

    @ Chinouk : ben non... Dalva m'a été offert mais j'ai préféré commencer plus " modestement ". Maintenant, je suis motivée pour Dalva, faut juste que je me rende disponible, bien l'impression que cette lecture va être dévorante !
  • Tania

    3 Tania Le 13/12/2017

    Je n'ai lu que "Dalva", cette nouvelle pourrait me plaire.
  • Iloucat

    4 Iloucat Le 13/12/2017

    J 'ai lu Dalva et dans l 'après midi je parcourais le livre Amérique et écrivains en liberté.Quelques pages évoquaient Jim Harrison alors oui ce petit livre me tente.
  • Ingannmic

    5 Ingannmic Le 13/12/2017

    J'aime beaucoup Jim Harrison, Dalva est l'une de mes héroïnes préférées ... ce billet me rappelle que cela fait bien longtemps que je n'ai pas lu cet auteur, dont deux titres traînent toujours sur ma PAL. Du coup, j'en sors un, ce sera ma prochaine lecture !
  • Autist Reading

    6 Autist Reading Le 13/12/2017

    Comme Chinook, je suis étonné d'apprendre que tu n'avais encore jamais lu Jim Harrison. Étonné... et ravi, car je me sens moins seul (quoique désormais, je sois le seul des deux à ne pas avoir encore franchi le pas!!). Et pourtant, ma PAL ne manque pas de tentations "Harrisoniennes", Dalva en premier lieu mais aussi ses mémoires et quelques recueils de nouvelles... A propos de De Lillo, la dernière fois, je te parlais de monstres de littérature qui m'effraient... En voilà un autre à ajouter à la liste !
  • Kathel

    7 Kathel Le 14/12/2017

    Je suis aussi étonnée que tu ne l'ai jamais lu !
    J'ai dévoré quantité de romans ou nouvelles de Jim Harrison puisque souvent ses romans sont composés de trois longues nouvelles. Il faudrait que je relise Dalva, premier et trop ancien, mais plus récemment j'ai adoré Légendes d'automne ou Retour en terre, entre autres !
  • Marilyne

    8 Marilyne Le 14/12/2017

    @ Tania : on dirait bien que j'ai lu à l'envers en ne commençant pas par Dalva, tellement connu. J'aime les nouvelles, j'y reviendrai aussi. Avec celle-ci, tu retrouveras sûrement le Jim Harrison que tu as lu, en plus court.

    @ Iloucat : Je suis ravie de vous relire, merci pour votre commentaire. Il n'y a aucune raison de se priver d'un folio deux euros. Celui-ci me donne autant envie de me plonger dans Dalva que de lire d'autres nouvelles.

    @ Ingannmic : oh, bonne prochaine lecture à toi ( qui va me tenter encore :))
  • Marilyne

    9 Marilyne Le 14/12/2017

    @ Autist Reading : non, non, non, c'est moi qui suis très étonnée, je te croyais beaucoup plus à l'Ouest que moi :-D ( la preuve, tu es collectionneur ;)). Je n'ai pas tant lu de littérature américaine. Pour De Lillo, ce sera aussi une première, le thème de son dernier roman m'interpelle. Sinon, à propos de monstres, Hemingway, on en parle ?... ( lui, je l'ai lu, projet de cette année, le (re)lire, je tiens le programme. Gentiment. )
  • Marilyne

    10 Marilyne Le 14/12/2017

    @ Kathel : Oups... ;) Tu me rends encore plus curieuse en me parlant de romans constitués de trois nouvelles. Tu vois, je débute ! ( et souvent, en littérature américaine, je pioche des titres chez toi :))
  • Laeti

    11 Laeti Le 14/12/2017

    J'ai entamé Légendes d'automne mais je l'ai mis de côté car je n'étais pas dedans, même si l'écriture me plaisait beaucoup. ça arrive les coups de mou niveau lectures :) Donc comme toi je suis "vierge" de Jim Harrison lol
  • Aifelle

    12 Aifelle Le 15/12/2017

    Auteur toujours pas lu non plus ! l'occasion se présentera peut-être, mais quand on voit tout ce qui sort, sans compter ceux qu'on a envie de suivre ... on ne peut tout simplement pas y arriver.
  • Marilyne

    13 Marilyne Le 15/12/2017

    @ Laeti : bon, pour Légendes d'automne, je vais t'attendre ;-)

    @ Aifelle : ben alors ^-^ . C'est certain que, malgré les envies, on ne peut pas tout lire ! Finalement, cette lecture, c'est l'heureux hasard d'une balade en librairie :)
  • maggie

    14 maggie Le 16/12/2017

    J'ai aussi prévu de le lire ! Ce sera mon premier de cet auteur. J'espère que je vais aimer autant que toi !
  • Marilyne

    15 Marilyne Le 18/12/2017

    @ Maggie : ah, tant mieux, j'attends ton retour de lecture ( en croisant les doigts ! )
  • maggie

    16 maggie Le 27/01/2018

    J'ai beaucoup aimé cette nouvelle. A l'occasion, j'en lirai peut-être d'autres...
  • Marilyne

    17 Marilyne Le 29/01/2018

    @ Maggie : moi aussi :) J'apprécie le format Nouvelle, mais avant Dalva !...

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