Le violon du fou - Selma Lagerlöf

Violon fou

- Actes Sud 2001 - Babel 2006 -

- Traduit du suédois par Marc de Gouvenain & Lena Grumbach -

Loin de chez lui, Gunnar passe ses journées à jouer du violon au détriment de ses études. Lorsqu'il apprend que le domaine familial est en décrépitude, que sa mère est ruinée, il décide de rentrer, d'oublier sa musique et d'être enfin raisonnable. Confiant, le jeune héritier se met donc au travail en investissant leurs derniers sous dans l'élevage. Mais le troupeau est décimé par l'hiver. Impuissant, désespéré et hon­teux, Gunnar perd la raison.
Devenu colporteur, il sillonne la région avec son éternel violon tel un mendiant halluciné, jusqu'au jour où, effrayé par d'obscures visions, il se réfugie dans un cimetière...

Ce récit de Selma Lagerlöf ( Nobel de littérature en 1909 ) date de 1899. S'il est écrit Roman, il s'agit plutôt d'un conte ( et d'une jolie romance ) agrémenté d'une écriture savoureuse et de quelques touches de fantastique - des songes, Madame Deuil aux ailes de chauve-souris -. J'ai retrouvé le même plaisir qu'à la lecture des Contes de Noël de Selma Lagerlöf, le même esprit " d'enchantement " sans mièvrerie. Quant à l'histoire, j'ai parfois également songé à ma lecture de " La Belle et la Bête " dans la première version de Madame de Villeneuve ( qui sera repris " condensé " et moralisateur par Mme de Beaumont dont la version restera à la postérité ).

Le titre original traduit en français est " Histoire d'un domaine ". S'il est moins évocateur et accrocheur que Le violon du fou, il donne bien le thème de cette histoire, le château à l'abandon, la mort qui y étend son emprise avant qu'un retour à la vie de l'héritier ne le libère. C'est une histoire de vocation et d'amour contrariés, jusqu'à ce que chacun se retrouve, avec un bel hommage aux artistes qui se consacrent à leur art, chaque jour, dans la rue, - les saltimbanques -, apportant de la joie et du rêve, ainsi qu'un hommage au pouvoir ( parfois cathartique et libérateur ), à la magie de la musique, faisant de ce violon, présent en début et fin de récit, un personnage à part entière, une part du personnage lui-même, lui rendant la mémoire, la paix et sa vie.

- Lecture inscrite au Challenge nordique de Margotte -

L'illustration de couverture est le détail d'une toile de Bruegel l'Ancien intitulé Le Trébuchet ( 1565 ). Je vous propose plutôt le peintre et graveur suédois Anders Zorn ( 1860-1920) contemporain de Selma Lagerlof, originaire de Dalécarlie, au centre de la Suède, une région aride et rurale, région dans laquelle se déroule l'histoire du Violon du fou.

Une exposition de tableaux d'Anders Zorn se termine au Petit Palais à Paris, plus de cent ans après une première exposition parisienne, époque à laquelle l'artiste était renommé. Plusieurs de ses toiles m'ont évoqué cette lecture, dont celles-ci :

Zorn self portrait 1882

- Autoportrait - 1882 -

( qui m'a fait songer au jeune Gunnar étudiant, persuadé d'être encore héritier sans souci d'argent, l'avenir devant lui )

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Zorn marche mora

Le marché à Mora - 1892 - 

( qui m'a interpellée pour les scènes de Selma Lagerlöf décrivant les moqueries et le rejet que subit le fou au violon colporteur, le Dalécarlien, dans les villages, ses peurs, ses abandons, alors qu'une jeune femme est là, proche de lui, à l'attendre )

Je n'ajouterai pas de discours sur le talent de Anders Zorn pour rendre les lumières et le vif des scènes, pour rendre les éclats et les reflets de l'eau, sur son art du portrait. 

Florilège :

Zorn buisson

Buisson d'épines - 1886 -

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Zorn ete

Vacances d'été - 1886 -

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Zorn the cigarette girl

Femme à la cigarette - 1892 -

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Zorn reveil

Réveil boulevard de Clichy - 1892 - ( aquarelle ) -

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Deux portraits en eau-forte pour les gravures :

Zorn verlaine

- Paul Verlaine - 1895 -

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Zorn rodin

- Auguste Rodin - 1906 -

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Commentaires

  • Anne

    1 Anne Le 08/12/2017

    Mmm cette lecture est très attirante. Et quels magnifiques souvenirs de cette découverte d'Anders Zorn...
  • Kathel

    2 Kathel Le 09/12/2017

    C'est un billet très complet, on se retrouve en Suède au tournant du XXème siècle !
  • Aifelle

    3 Aifelle Le 09/12/2017

    Avec Zorn, on reste complètement dans l'ambiance ! Je n'ai jamais lu Selma Lagerlöf, je devrais sans doute le faire, mais je suis plus attirée par les contemporains.
  • Marilyne

    4 Marilyne Le 09/12/2017

    @ Anne : oh que oui, précieuse journée de lumières :)

    @ Kathel : merci. Et ce ne fut même pas prémédité ( ou inconscient ^-^ ), j'ai lu Selma Lagerlöf en allant à Paris ! C'est pour cela que les tableaux m'ont interpellée.

    @ Aifelle : j'ai beaucoup aimé cette exposition. Pour Selma Lagerlöf, je n'ai lu que des textes courts. J'envisageais de lire " Le merveilleux voyage de Nils... " maintenant qu'il est édité en version intégrale, plus de 600 pages, ce ne sera pas pour tout de suite ;-)
  • Tania

    5 Tania Le 09/12/2017

    J'ai lu "Le merveilleux voyage..." en version courte, il me semble. Cette édition intégrale m'intéresse.
    Quant aux contes, je ne les ai jamais lus - j'ai pensé aux violonistes de Chagall en découvrant le titre.
  • jerome

    6 jerome Le 10/12/2017

    Jolie découverte. J'ai un de ses titres dans ma pal depuis des années, il faudrait que je l'en sorte.
  • Margotte

    7 Margotte Le 10/12/2017

    Quel beau billet ! Cela me donne vraiment envie de découvrir ce texte de Selma Lagerlöf. Je ne connaissais pas le peintre, les tableaux se marient parfaitement bien avec l'article :-) L'aquarelle avec la scène de réveil est d'une douceur... Merci pour cette participation et bon dimanche :-)
  • Marilyne

    8 Marilyne Le 10/12/2017

    @ Tania : comme toi, à la lecture, je me disais qu'un violoniste de Chagall aurait été parfaiT en illustration de couverture. Pour l'édition intégrale de " Nils ", publié en beau livre Actes Sud illustré mais maintenant il n'est qu'en Livre de poche.

    @ Jérome : ce serait la saison. ( c'est vrai que ce type de classique, on a tendance à les laisser s'endormir )

    @ Margotte : Merci ! J'ai découvert, avec bonheur, ce peintre lors de cette exposition. Ah, l'aquarelle, parmi mes préférences ( j'en ai regretté de ne pouvoir en emporter une reproduction )

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