Le commandant Bill - Armel Job

 

Billjob

- Editions Mijade -

Ardenne, mai 1940.Tout le hameau de Boisferté s'est réfugié dans la forêt, dans la crainte de l'invasion des troupes allemandes. Les plus anciens, en effet, se souviennent des saccages de 1914. Le matin du deuxième jour, un avion allemand tombe à proximité du campement. Il y a un rescapé. Les villageois recueillent cet homme incapable de se déplacer et l'installent dans une grange, sans se rendre compte qu'ils se sont transformés en geôliers d'un prisonnier de plus en plus encombrant.

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Armel Job est un auteur prolixe. Il signe avec Le commandant Bill un excellent " roman ado " sur l'invasion de la Belgique en 1940 par l'armée allemande.

Bien que je n'ai pas retrouvé dans ce récit la profondeur des portraits et des sentiments du roman Baigneuse nue sur un rocher, j'y ai reconnu le ton et le style savoureux, ces phrases qui font mouche, l'humour tendre à la dérision, une tendresse pour chacun des personnages, son humanité sur l'absurde et la violence de la guerre. Dans ce roman, le guerre ne transforme pas les hommes, elle bouleverse leurs vies au quotidien, perturbe les relations, l'immuable du huis-clos villageois. Ce mois de mai, c'est l'attente de la reddition, qu'on espère, du retour des jeunes mobilisés, du retour d'un fils qui a fui à l'annonce de l'armistice pour ne pas devenir un soldat prisonnier de guerre, qu'il faut cacher alors que cet avion s'est écrasé tout près, qu'un des pilotes est là, soigné, nourri, dans une grange, pris en charge par Eva, la sage-femme, personnage absolument fabuleux - " Car les yeux des femmes ne voient pas comme ceux de leurs preux chevaliers. Ils distinguent encore l'homme derrière sa cuirasse de gugusse. " -. Mais on ne sait qu'en faire de cet Allemand alors que l'on doit protéger le fils proscrit tout en le ménageant ce pilote ennemi parce que, sans le moindre doute, les troupes allemandes vont bientôt suivre et il faudra rendre des comptes. Près d'ici, les ruines du village voisin, incendié en 1914... 

Le récit est linéaire, chronologique sur ce temps resserré de mai 1940; un récit rythmé sur une intrigue bien ficelée bien que les événements et dénouement soient attendus pour le lecteur adulte. On y lit de très beaux passages sur cette invasion, sur la situation de " ce petit pays " face à la puissance nazie, en écho dans ce village, en souvenir de la Première Guerre Mondiale; de beaux passages sur ce qu'est " l'ennemi ", la haine de l'ennemi, et puis sur qui est " l'ennemi ".

Armel Job se garde de raconter en noir et blanc. Il raconte les hommes et les femmes, les silences et les actes. Des couleurs sépia, un roman comme une reconstitution historique, un roman mémoire comme il le précise dans une note d'introduction : originaire de l'Ardenne, son histoire est inspirée de celles entendues dans l'enfance, un hommage à la tradition orale, à une légende de la Résistance.  

Refusant les conventions du genre " roman ado ", Armel Job ne choisit ni narrateur ni " héros " adolescent. Chacun trouve sa place dans ce roman; chacune des personnalités s'y déploie. Ils ne jouent pas de rôle ces personnages là. Simplicité ne veut pas dire simplification. Et c'est aussi une histoire de relation père-fils. 

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- Rendez-vous littérature jeunesse du mois belge organisé par Anne et Mina -

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Commentaires

  • Laeti

    1 Laeti Le 14/04/2015

    Il est très positif malgré tout, ton billet! Décidément, les romans d'Armel Job font l'unanimité. J'ai lu un billet ce matin sur Le bon coupable. On a l'embarras du choix, comme tu dis! Ce qui semble intéressant dans ses histoires, c'est la façon dont elles sont incrustées dans un environnement, un paysage connu pour nous en Belgique.
  • Anne

    2 Anne Le 14/04/2015

    Je l'ai repéré aussi, celui-là, et en effet Mijade est une belle maison d'édition jeunesse !
  • Marilyne

    3 Marilyne Le 17/04/2015

    @ Laeti : absolument, billet positif. C'est juste que j'ai enchaîné les deux lectures, j'ai pu voir les différences dans l'écriture, notamment dans la construction narrative. Je viens d'apprendre que ce roman est parfois lu-étudié en classe et je n'en suis pas étonnée.

    @ Anne : oui, cela a ajouté à mon choix de pouvoir présenter une publication des éditions Mijade :)

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