Opéra sérieux - Régine Detambel

Opera serieux

- Éditions Actes Sud -

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Ce roman raconte le destin Elina Marsch, fille d’une cantatrice et d’un ténor, devenue elle-même diva d’opéra, de sa naissance en 1926 – et c’est déjà le cri, la vie, la mort et le sang, toute la folie et la violence de ce récit – à sa fin dans les années 50. Sa chute. Elina qui s’éteint.

Ces pages, ce sont celles d’un répertoire d’opéra, un hommage à cet art lyrique, à ses accents tragiques et passionnels, à l’extra-ordinaire de ces vibrations auxquelles répondent le corps et l’esprit.

Résumer ce récit serait tellement réducteur. De l’Histoire de l’Europe, de cet autre déchaînement de démence meurtrière, il n’est à peine question, c’est un autre monde, un autre temps. Cette histoire là est celle d’une autre partition inhumaine, d’une autre fureur, d’un excès prodigieux et terrible, un tourbillon de forces tourmentées, de l’exubérance jusqu’à la convulsion, l’effroi. Et du style. Des mots graves, des phrases aiguës qui (s’)enchaînent sur de courts chapitres comme des séquences fragmentées, des scènes portées par des voix troublantes. Qui se lisent d’un souffle.

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 » Il fait froid. Cette enfant glacée va renaître, et deux petits brûleurs s’allumeront sur ses joues quand quelqu’un s’assiéra au piano pour chanter.

Elle s’appelle Elina Marsch. Elle souffre de maux effrayants, elle ignore ce que lui réserve encore son passé.

Les oiseaux dans sa tête gagnent du terrain. « 

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Sept succès et bien plus de sept scandales par an : des crimes d’amour, des influences fatales, du sublime sans interruption, des adultères, des vengeances, c’est Norma, c’est Anna Bolena. Corsetée et autoritaire, la diva glisse du grave au suraigu sans efforts apparents, pas gracieuse mais toujours furieuse et tranchante, la merveille du genre, la vaillance de la voix. Elina Marsch est une dandy. Elle n’a presque pas de corps. Elle est une voix et seulement une voix, c’est-à-dire une outre de jouissance qui dépose l’auditeur sur les sommets du monde et le détourne de ses bas-fonds. Le reste du temps, elle mène sa vie solitaire dans les loges abondamment pourvues de miroirs. S’amoncellent ses toilettes. Elle aime les écharpes, les foulards, les châles, tout ce qui à la fois étrangle et réchauffe, et puis un matin elle les jette, elle ne garde rien, ni un boléro de cachemire ni un homme, elle est une arme de jet, un arc infatigable propulsant aux quatre vents tout ce qu’elle possède et qui l’a touchée. « 

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