Le pont sur la Drina - Ivo Andric

Drina

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- Traduit du serbo-croate par Pascale Delpech -

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Il est extrêmement rare que j'abandonne une lecture en cours. C'est ce qui est arrivé à ce roman de Ivo Andric, auteur que je lisais pour la première fois. J'ai arrêté parvenue à mi chemin. Je le regrette car je voyais bien où nous emmenait l'auteur, ses thèmes, mais vraiment la lassitude me prenait trop, la lecture durait, sans plaisir, ni réel intérêt. 

La plume est belle bien qu'elle soit sobre, évocatrice, précise. Le talent de conteur d'Ivo Andric est évident.

L'auteur " bosniaque par sa naissance, croate par son origine et serbe par ses engagements d'alors " ( ce roman est paru en 1945 ) nous raconte l'histoire - les histoires - d'une ville frontalière, Visegrad, entre Bosnie et Serbie, où un pont majestueux relie les deux rives du fleuve appelé la Drina.

Ce qu'il nous raconte, c'est l'histoire complexe de cette région, de cette frontière aussi géographique que religieuse et culturelle. C'est une frontière entre Occident et Orient. C'est donc le récit, à la façon de chroniques,  parfois absurdes, souvent cruelles, des communautés chrétiennes et musulmanes, de l'Empire turc puis austro-hongrois. 

Ce pont est un lieu de rencontres, de révoltes, d'exécutions, de nouveautés. Il voit toutes les générations, tous les bouleversements sans en être affecté, comme éternel. Ivo Andric nous parle de permanence et d'impermanence, de temps à l'aune des vies humaines. Ce sont donc des histoires et légendes - comment naissent les légendes - de la ville et de ses environs, des histoires incarnées. A la façon des contes, des vieillées, des soirées sur la kapia, cet espace du pont où l'on s'assoie et se retrouve - sans qu'il y ait d'oralité dans le style mais plutôt dans le propos - Ivo Andric relate des événements inscrits dans leur époque, s'attardant sur les personnes concernées, nous présentant le caractère, l'allure, sa famille, son passé, nous laissant profiter du paysage par ses descriptions. 

Chacun de ces chapitres, chacune de ces histoires, depuis la construction du pont au XVIème siècle, écrites à la façon de nouvelles reliées chronologiquement, donnent une véritable ampleur au récit. Toutefois, ce rythme ne m'a pas entraînée, au contraire, il m'a même parfois semblé répétitif. Je pense que des époques plus récentes - j'imagine que le récit nous mène jusqu'au début du XXème siècle - m'accrochera plus à cette lecture, j'y reviendrai.

Cette médiocre édition Livre de poche aux minuscules caractères, à la piètre impression, n'a pas encouragée ma lecture.

En lisant, je pensais à Sarajevo omnibus de Velibor Colic dont la lecture m'avait enthousiasmée, à Lisières de Kapka Kassabova qui m'avait passionnée, beaucoup appris sur les zones frontalières aux confins de l'Europe.

- Lecture d'Ivo Andric - Prix Nobel de littérature 1961 - partagée avec Passage à l'Est et Nathalie -

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Commentaires

  • eimelle

    1 eimelle Le 15/06/2022

    il y a encore quelques années je me forçais à finir chaque livre commencé, maintenant, j'insiste moins, il y en a tellement d'autres à découvrir!
    marilire

    marilire Le 16/06/2022

    Je te comprends. Il est rare que j'arrête parce que je choisis mieux aussi, je sélectionne.
  • krol

    2 krol Le 15/06/2022

    Ca m'arrive souvent d'abandonner. Parfois ce n'est pas le moment et j'y reviens plus tard. Parfois je sais que le livre n'est pas pour moi et je le ferme pour ne plus y revenir.
    marilire

    marilire Le 16/06/2022

    Souvent, ce sont dès les premières pages que l'on réalise que la lecture ne nous convient pas. Là, l'arrêt a été frustrant. J'aurai certainement continuer si le livre avait été grand format.
  • Passage à l'Est!

    3 Passage à l'Est! Le 15/06/2022

    Oh là là! Abandonner un PRIX NOBEL de littérature! Quelle honte mais quelle honte!
    Ceci dit, je partage en partie ton ressenti - dans mon souvenir, j'avais trouvé la fin un peu longuette, et on ne peut pas dire qu'Omer pacha Latas soit d'un dynamisme fou. Mais j'ai bien aimé tout de même - surtout la minutie de certaines descriptions. Le fait qu'Omer pacha Latas soit divisé en chapitres vraiment séparés, chacun avec sa petite histoire, aide beaucoup, je crois (sachant qu'il ne couvre qu'une année, pas plusieurs siècles).
    Je lirais volontiers ses nouvelles et récits, mais c'est plus difficile de se les procurer.
    Merci de ta compagnie pour cette nouvelle lecture commune!
    marilire

    marilire Le 16/06/2022

    Scandaleux ! Absolument scandaleux ! Quand on pense que j'ai terminé Le saut d'Aaron alors que je ne termine pas ce roman, c'est indécent ! Et puis, s'arrêter comme ça, au milieu d'un pont, c'est absurde ( quoique il y a le cafetier, les pastèques et les melons :)). Je postule tout de même pour le rendez-vous avec Olga Tokarczuk ( en attendant, je crois que je vais reprendre gentiment Kadaré ).
  • A_girl_from_earth

    4 A_girl_from_earth Le 16/06/2022

    J'abandonne aussi très rarement, surtout si j'ai vraiment bien entamé le livre, mais bon, si le plaisir n'est plus là, il faut se rendre à l'évidence (ce que je n'ai pas fait pour Solénoïde d'ailleurs, haha !). Aaah, et moi je ne sais plus lire les poches aux minuscules caractères, je ne m'y risque même plus. Il y a certaines éditions, c'est vraiment abusé.
    marilire

    marilire Le 16/06/2022

    Total respect pour Solénoïde ;). De l'abus, je suis d'accord pour cette édition épouvantable, c'est une misère. Si je reprends, je vais essayer de le retrouver en grand format ce roman. ( le confort - de lecture - à mon âge, ça compte. Je revenais de l'opticien, m'enfin ! )
  • nathalie

    5 nathalie Le 16/06/2022

    C'est vrai que c'est assez répétitif et que ça se tire. J'ai dû le lire dans de bonnes dispositions pour que ça passe. Je possède certains des autres titres que tu cites, faudrait que je les ouvre à mon tour !
    marilire

    marilire Le 16/06/2022

    Je te recommande vraiment Sarajevo Omnibus, j'ai adoré, le fond comme la forme.
  • Kathel

    6 Kathel Le 16/06/2022

    Je ne connais l'auteur et le livre que de loin, et ça risque de rester comme ça... J'ai déjà Lisière qui reste lu jusqu'à la moitié, et qu'il faudrait que je continue ! Ce n'est pas inintéressant, mais un peu longuet tout de même...
    marilire

    marilire Le 16/06/2022

    Oh, dommage pour Lisière, j'ai vraiment suivi sans lassitude la narratrice ( il faut dire qu'elle m'apprenait tout ).
  • Annie

    7 Annie Le 16/06/2022

    Je suis très étonnée par ces commentaires, j'ai adoré "le Pont sur la Drina", l'histoire de ce pont, de ces communautés ballottées par les événements...
    Tout y est, selon moi, admirablement décrit : paysages, atmosphères, personnages, faits historiques... et j'ai éprouvé beaucoup d'émotions en le lisant, davantage qu'avec "la Chronique de Travnik".
    Je pense qu'Andric n'est pas un auteur facile et qu'il faut vraiment prendre son temps pour "entrer" dans son texte.
    marilire

    marilire Le 20/06/2022

    Bonjour Annie, pardon pour cette réponse tardive. Vous avez raison, il faut être disponible pour pleinement apprécier cette lecture, lui donner le temps. C'est toute ma frustration, c'est pourquoi je désire relire ( et ce dans un format agréable ).
  • Passage à l'Est!

    8 Passage à l'Est! Le 18/06/2022

    Je reviens te voir, au milieu du pont, parmi les pastèques et les melons, pour te demander si le 6 octobre te convient, pour Olga Tokarczuk?
    (p.s. il n'y a plus de cases google à cocher, hourrah et merci!)
    marilire

    marilire Le 20/06/2022

    Il doit être écrit que mes participations ne se passeront pas comme prévu... Je suis absente ( et absolument indisponible ) du 5 au 15 octobre, je n'y ai plus pensé en postulant.
  • Annie

    9 Annie Le 20/06/2022

    Oui, pas évident de lire Andric en format de poche... Plusieurs de ses ouvrages ont été édités chez Belfond, en grand format, mais ils ne doivent plus être disponibles désormais (peut-être en occasion)...
    marilire

    marilire Le 21/06/2022

    Je ne pourrais le trouver en grand format qu'en occasion ( cela ne me dérange pas, au contraire, j'aime bien avoir un prétexte pour farfouiller :))
  • Bonheur du Jour

    10 Bonheur du Jour Le 20/06/2022

    Je l'ai lu il y a vraiment longtemps et il m'avait beaucoup plu. Je comprends toutefois qu'on s'arrête en cours de lecture. Si on n'accroche pas, il ne faut pas insister. Trop de projets de lecture attendent !
    marilire

    marilire Le 21/06/2022

    Je crois qu'il vaut mieux arrêter que gâcher la lecture, lorsque l'on sent que l'on est pas suffisamment réceptif. Et c'est vrai qu'il y a tant de projets lectures.

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